Favoriser le vivre-ensemble à Échallens à travers un projet de permaculture

Par Claude Amblet

Mes constats

Depuis des années de nombreux films/documentaires verts ainsi que les films de Yann Arthus Bertrand ou Coline Serreau font état de la situation de notre planète. Ils nous disent que nous ne pouvons plus continuer à vivre et consommer comme nous le faisons. En cause: la pollution, notre système économique et le partage des ressources (le capitalisme à outrance). Nous le savons… mais  continuons dans la même logique. Peut-être parce que nous ne savons pas faire autrement?

Récemment, deux documentaires (“Demain” et “En quête de sens”) nous ont montré que nous pouvons agir autrement, de manière plus responsable pour l’environnement et le bien-être de tou·tes. Il suffit d’une ou plusieurs personnes qui se mettent en marche et osent des idées “nouvelles”, remettant en cause des a priori reçus peut-être déjà dans l’enfance et largement véhiculés par la société, donc par nous-mêmes aussi.

Ces deux films ont surtout réveillé l’espérance dans un “c’est possible de vivre autrement”. Dans ce cadre, la permaculture apparaît comme une chance pour notre humanité de passer à une autre manière de vivre ensemble. La permaculture est à voir de manière très large, car elle englobe les différentes facettes de la vie en société (l’éducation, les énergies, l’économie, l’habitat, le travail, l’agriculture), comme cela apparaît bien dans le film “Demain”.

La permaculture n’est donc pas en premier lieu une nouvelle manière de cultiver biologiquement, mais une philosophie de vie qui replace l’être humain au sein de la Création. Elle repense cet être humain en relation aux autres, à la nature, aux animaux, dans une dimension de partage et d’interrelation entre toutes les composantes de la Création, avec une dimension qui nous dépasse et a créé le tout – et que l’on peut nommer de différentes manières, suivant les croyances de chacun·e.

La permaculture est basée sur l’observation de la nature, des animaux et des humains et sur la recherche des interactions propices à favoriser une harmonie entre toutes les composantes de la Création et une fécondité, en vue du bien-être et d’une juste croissance de chacun de ses éléments.

Aveuglée par le progrès technique, notre civilisation a oublié une certaine connaissance et une sagesse de vie que d’autres peuples ont mieux su garder vivantes. La permaculture nous invite donc à retrouver un bon sens de base, pour que chacun·e ait une place et un avenir sur notre Terre.

Ces films ont mis en route un certain nombre de personnes, qui se sont mises à y croire, comme on peut le constater autour de nous. Autant de personnes en attente de croire à un possible. Ne serait-ce qu’à Échallens, on peut relever au moins deux initiatives: le sauvetage de l’épicerie bio par la création d’une association et le lancement d’une réflexion dans le but de créer une monnaie locale. C’est dans le même mouvement que s’inscrit notre projet de permaculture, qui mûrissait depuis quelques années en nous, avec des contours évolutifs.

Nous nous sommes dit: et pourquoi pas ici?

Objectifs

1) Permettre aux personnes d’ici et d’ailleurs de se rencontrer, de partager, en réalisant une œuvre commune.

Dans mon travail auprès des personnes migrantes, j’ai découvert l’importance de la rencontre et du partage entre les êtres humains. C’est la voie royale pour sortir des jugements, des a priori, des peurs que l’on peut ressentir face à la différence.

Cela devrait nous amener à la conscience que l’humanité est une dans sa diversité, qu’elle soit culturelle, religieuse, économique, professionnelle, contextuelle, de parcours de vie.

La rencontre, le partage, la convivialité, l’activité commune sont une grande aide pour construire la communauté humaine. La rencontre de l’autre (l’ailleurs peut être son voisin, une personne d’un autre quartier, d’un autre village ou d’un autre pays!). Nous croyons profondément que l’arrivée de personnes migrantes à Échalllens est une chance (et non pas une catastrophe) pour élargir notre conscience, pour apprendre à construire un monde plus fraternel et juste, ce qui est un des plus grands défis actuels pour l’humanité.

Ce projet vise donc à être toujours plus conscient des enjeux et des réalités du monde, à constater que nous sommes toutes et tous reliés les un·es aux autres et coresponsables de l’avenir de la Planète. Il n’est plus l’heure de jouer perso, chacun·e chez soi.

2) Approfondir la conscience de notre place dans la Création, en observant la nature

La permaculture est une voie royale pour nous ramener à ce qui nous est commun, en particulier la Création, la Terre, dont nous avons à prendre soin tou·tes ensemble, comme de bon·nes gérant·es, et non pas comme des propriétaires.

Nous avons reçu la Terre en héritage. Nous en sommes donc cohéritières et cohéritiers.

Ce retour à la Terre nourricière, c’est un retour à nous-même, au fondamental. Les astrophysiciens nous disent que nous sommes des poussières d’étoiles. Nous sommes donc une partie de l’univers.

Quand j’ai les mains dans la terre, c’est comme si je mettais les mains dans ma terre intérieure. Travailler la terre me ramène à moi-même. La Terre nourricière me rappelle que tout est don, que j’arrive ici sans rien et en repars sans rien. Entre ces deux instants, je peux avoir l’illusion que je possède beaucoup de choses, mais cela n’est que construction mentale humaine, car je peux tout perdre en un instant. Tout est donné au fur et à mesure.

La permaculture est un moyen pour approcher ma vraie place dans la Création.

Mon expérience me montre que souvent les Africains, les Asiatiques ou certains peuples d’Amérique du Sud sont bien plus proches de la terre que nous autres, Occidentales et Occidentaux, et des valeurs qui lui sont liées, avec une certaine sagesse de vie. Nous avons donc plein de choses à nous partager pour nous enrichir mutuellement.

3) Améliorer la qualité de notre alimentation

Il est urgent que nous adoptions une alimentation plus saine et respectueuse de l’environnement et de nos corps (diminution de la consommation de viande et de produits laitiers, redécouverte de certains légumes ou variétés oubliés, préférence à des produits de saison…).

Il est urgent que les citoyennes et citoyens envoient des signaux clairs aux politiques et à l’économie, avant d’être envahi·es de pesticides et d’OGM, de perdre le droit de choisir son alimentation et de ne plus accéder librement aux semences. Il est important de rapprocher consommatrices et consommateurs des productrices et producteurs, en développant une agriculture à taille humaine et de proximité. Pourquoi ne pas rêver d’un village qui ose créer des parcelles de permaculture bio pour nourrir ses citoyennes et citoyens?

4) Apprendre des techniques nouvelles d’agriculture et développer notre créativité pour nos vies. Vivre le “Viens et Va” qui nous tient à cœur.

Par l’observation de notre coin de terre, nous redevenons intelligent·es des signes du ciel et de la nature. Par l’échange d’informations, de techniques et de semences avec d’autres permacultrices et permaculteurs, nous pouvons développer nos capacités et nos connaissances. Et aussi stimuler notre propre créativité en osant des choses nouvelles. Pour cultiver aussi notre propre jardin.

Comme le disait Einstein: “On ne résout pas les problèmes avec les modes de pensée qui les ont engendrés.” Il nous faut donc oser, inventer de nouvelles idées et solutions, pour faire face aux défis d’aujourd’hui, sans attendre les solutions des politiques, de l’économie, des industriels. Il faut oser sortir de la posture de “victime”, qui subit, pour entrer dans celle du “Créateur” qui ose!

Osons être ingénieuse et ingénieux, et dans le cas qui nous occupe, en portant un autre regard sur l’autre et ses différences, sur notre alimentation, sur notre place dans la Création.

VIENS!

Viens partager ce coin de terre, laisse-toi enseigner, apprends, donne-nous ton savoir, reçois des autres et de la terre elle-même et …

VA!

Va plus loin partager avec d’autres et ose construire ailleurs.

L’idée ce n’est pas de créer une communauté d’écolos qui sont contre tout!

L’idée c’est de nous réveiller, de partager, de nous stimuler, de faire ensemble, de croire au C’EST POSSIBLE et d’AGIR maintenant, avec ce que nous avons devant nous, tout simplement!

Projet de permaculture à Échallens: l’idée